Analyse Juridique | Public des Affaires
« Quelles informations de l’offre de l’attributaire d’un contrat de la commande publique peuvent être transmises à ses concurrents ?  » un article de Marc de Monsembernard
31 mars 2023

Quels sont les documents produits et reçus par les administrations au cours d’une procédure de passation d’un contrat de la commande publique qui sont, sur le fondement des articles L. 311-1 ss. du code des relations du public et de l’administration (CRPA), communicables ?

La jurisprudence administrative a fixé les principes applicables à la communication de ces documents dont le caractère administratif, au sens du CRPA, ne soulève pas de doute, en tentant de maintenir un équilibre entre l’exigence de transparence administrative et la protection du secret des affaires, à savoir le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles.

Revenant sur des solutions classiques, le Conseil d’Etat a jugé que si l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire étaient en principe communicables, tel n’était en revanche pas le cas du bordereau des prix unitaires de l’entreprise attributaire. Ce document reflète en effet la stratégie commerciale de l’entreprise et sa communication est susceptible de porter atteinte au secret commercial (CE 30 mars 2016, Centre hospitalier de perpignan c. Bureau européen d’assurance hospitalière, n° 375529, Lebon). De la même manière, le détail quantitatif estimatif d’un marché et l’offre finale détaillée du candidat retenu, s’ils reflètent la stratégie commerciale de l’entreprise, ne sont pas communicables (CE 28 septembre 2016, Société Armor Développement et autres, n° 390760, Lebon T.).

Le Conseil d’Etat, dans l’arrêt Ville de Paris (CE, 15 mars 2023, req. n° 465171, Lebon T.) ajoute une nouvelle pierre à l’édifice.

Par principe, les documents et informations échangés entre l’administration et un candidat lors de la phase de négociation d’un contrat de la commande publique, dès lors qu’ils révèlent par nature la stratégie commerciale du candidat, entrent dans le champ du 1° de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA). Ils ne sont, par suite, pas communicables.

La question est toutefois de savoir quels sont les éléments qui bénéficient de cette protection. L’arrêt en donne une illustration, s’agissant d’une concession de services relative à la conception, la fabrication, la pose, l’entretien, la maintenance et l’exploitation de mobiliers urbain.

S’ils ne mentionnent ni les prix unitaires, ni les caractéristiques précises de ces prestations, les éléments relatifs aux engagements pris par la société attributaire à l’égard du pouvoir adjudicateur en termes de quantité et de qualité des prestations ne révèlent en eux-mêmes ni des procédés de fabrication ou ni la stratégie commerciale de l’entreprise et sont donc communicables. Tel est, en particulier, le cas des éléments relatifs aux modèles de mobilier envisagés, à leur dimensionnement, à leur qualité, incluant la nature des équipements numériques proposés, à leur esthétique, à leur évolutivité ainsi qu’à leur nombre et au calendrier de leur déploiement.

Rédigé par

Marc de Monsembernard ASSOCIÉ

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