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Possibilité d’inscrire les titres financiers non cotés dans une « blockchain » : le décret est paru !
21 février 2019

Une ordonnance du 8 décembre 2017 prise sur habilitation de la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 a autorisé l’inscription de certains titres financiers dans un « dispositif d’enregistrement électronique partagé » (DEEP) ainsi que leur transfert par une inscription dans un tel dispositif. Cette possibilité offerte est une alternative à l’inscription des titres en compte existant actuellement et produira les mêmes effets (Ord. 2017-1674 du 8-12-2017 : JORF n°0287 du 9 décembre 2017, texte n° 24).

Le décret d’application de l’ordonnance du 8 décembre 2017, qui modifie les dispositions réglementaires du code monétaire et financier (CMF) et du code de commerce relatives à l’inscription et au transfert des titres, a été adopté le 24 décembre 2018 et publié au Journal Officiel du 26 décembre 2018 (Décret 2018-1226 du 27-12-2018 : JO 26 texte n°33). La nouvelle mesure est entrée en vigueur le 27 décembre 2018.

Cette mesure doit permettre d’alléger le coût de gestion des titres (aujourd’hui tenus dans des registres), faciliter leur transmission, garantir l’intégrité des inscriptions et permettre l’identification des propriétaires des titres ainsi que leur nature et leur nombre.

1. Quels sont les titres concernés par cette mesure ?

Cette mesure concerne les titres financiers au sens de l’article L. 211-1 du CMF (soit les titres de capital émis par des sociétés par actions, les titres de créance, y compris les titres de créance négociables (art. L. 213-2 CMF modifié), les parts ou actions d’organismes de placement collectif) qui :

  • ont été émis en territoire français et sont soumis à la législation française (art. L. 211-3 al. 1 CMF modifié) ;
  • ne sont pas admis aux opérations d’un dépositaire central (art. L. 211-7 al. 2 CMF modifié)

2. Quelles sont les caractéristiques requises du DEEP ?

La notion de « dispositif d’enregistrement électronique partagé » vise aujourd’hui principalement la technologie de la « blockchain » ou « chaîne de bloc » mais cette dénomination volontairement large pourra inclure de futurs développements technologiques.

Le décret prévoit que le DEEP doit être « conçu et mis en œuvre de façon à garantir l’enregistrement et l’intégrité des inscriptions et à permettre, directement ou indirectement, d’identifier les propriétaires des titres, la nature et le nombre de titres détenus ». Les inscriptions dans un DEEP doivent en outre faire l’objet « d’un plan de continuité d’activité actualisé comprenant notamment un dispositif externe de conservation périodique des données ». Le propriétaire de ces titres doit pouvoir disposer de relevés des opérations qui lui sont propres (art. R. 211-9-7 CMF modifié).

Le décret ne précise pas quel type de chaîne est admis, à savoir une chaîne ouverte ou fermée au public ou encore une solution mêlant ces deux types de chaîne.

3. Quelles sont les opérations gérées par le DEEP ?

Ce dispositif permettra principalement d’enregistrer les titres au nom de leur titulaire, de transmettre les titres par inscription dans le DEEP, de nantir les titres.

4. Comment peut-on recourir au DEEP ?

L’inscription des titres dans un DEEP sera possible sur décision unilatérale de la société émettrice (art. L. 211-7 CMF modifié). Les statuts prévoyant l’inscription en compte des titres devront faire l’objet d’une modification pour prévoir la possibilité d’inscription dans un DEEP. Les statuts ne contenant pas une telle clause n’auront pas à être modifiés.

En conclusion, si le décret définit les titres concernés par la nouvelle mesure, les caractéristiques du DEEP auxquels les sociétés peuvent recourir et tire les conséquences de l’usage de ce dispositif, il n’apporte aucune précision sur les qualifications requises du gestionnaire du DEEP et sur les garanties que doit présenter le DEEP ce qui pourrait retarder la mise en œuvre rapide de ce dispositif.

Rédigé par

Sophie Chavanes Counsel

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