Le projet de loi de simplification économique, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale après son adoption par le Sénat, a fait l’objet d’amendements importants le 27 mars 2025. Ces modifications, bien que provisoires avant leur passage en séance publique le 8 avril 2025, méritent une attention particulière de la part des entreprises.
I. Un encadrement renforcé des implantations commerciales
A. Autorisations d’Exploitation Commerciale (AEC) : les nouvelles contraintes
Fin des exemptions pour les déplacements d’activité – La suppression de la dispense d’AEC pour les transferts dans des locaux inoccupés depuis plus de trois ans au sein d’un même ensemble commercial implique désormais une demande d’AEC systématique. Cette mesure complexifie les opérations de restructuration des surfaces commerciales.
Seuils de superficie abaissés – Les nouveaux seuils de superficie nécessitant une AEC sont les suivants :
- 400 m² pour les commerces de détail (contre 1 000 m² auparavant).
- 800 m² pour les entrepôts logistiques dédiés au e-commerce.
Extension aux franchises – Les enseignes de restauration rapide franchisées et les groupes présents dans plus de 20 communes devront désormais obtenir une AEC, même pour des surfaces inférieures aux seuils. Ce durcissement vise à mieux encadrer le développement des réseaux de franchise.
Modification des Opérations de Revitalisation du Territoire (ORT) – Abaissement des seuils de superficie nécessitant une AEC (2 000 m² pour le non-alimentaire, 800 m² pour l’alimentaire) et suppression des extensions périphériques. L’objectif est de recentrer le développement commercial sur les centres-villes et de limiter l’étalement urbain.
B. Commissions d’aménagement commercial (CDAC et CNAC) : une transformation du rôle
Participation des commerçants – Mise en place de l’obligation d’informer et d’auditionner les commerçants de la zone de chalandise pour la CDAC, et ajout de personnalités qualifiées axées sur la protection des petits commerces.
Protection accrue des commerçants dans la zone de chalandise – La CDAC devra considérer l’impact des nouveaux projets sur les commerces existants, notamment en termes d’attractivité des prix, du nombre de points de vente des groupes de grande distribution, et de la surface des entrepôts. Cette disposition renforce la protection de la concurrence locale.
Saisine obligatoire de la CDAC par le maire dans les petites communes – Dans les communes de moins de 50 000 habitants, le maire devra soumettre au conseil municipal la proposition de saisir la CDAC pour les projets de 200 à 800 m².
Renforcement des conditions d’examen par la CNAC – Les règles d’examen des recours sont renforcées, avec interdiction de modifier le projet contesté et obligation d’informer les commerçants situés dans la zone de chalandise et de les auditionner à leur demande. De plus, une audition obligatoire de six personnalités qualifiées issues de la CDAC (deux en matière de protection des consommateurs, deux en matière de développement durable et deux en matière d’aménagement du territoire et revitalisation du tissu commercial) devra être mise en place.
II. Simplifications administratives et mesures d’accompagnement
Au-delà du renforcement de la régulation, le projet de loi, tel que modifié par les présents amendements, prévoit également des mesures de simplification administrative :
- Suppression d’attestations à fournir par les maîtres d’ouvrage pour les permis de construire, car considérées comme redondantes.
- Extension de la procédure de déclaration de travaux pour les Établissements Recevant du Public (ERP) aux cellules commerciales de moins de 300 m² situées dans les gares afin d’alléger les contraintes administratives pour les commerces en gare.
- Suppression du Haut Conseil à la simplification pour les entreprises.
Concernant les baux commerciaux, une restitution accélérée des locaux en cas de liquidation judiciaire est prévue, tandis que la limitation des délais de paiement pour les locataires en difficulté est supprimée, permettant une appréciation plus large par le juge.
Par ailleurs, un amendement a supprimé le recours obligatoire au ministre chargé des PME pour les litiges des gérants-mandataires, visant à accélérer le règlement de ces différends.
Enfin, les TPE/PME pourront bénéficier de visites de conseil sur les normes de sécurité et d’accessibilité, et la création temporaire de licences IV en zones rurales est supprimée en raison d’une proposition de loi distincte, prévoyant une mesure similaire.
Et maintenant, quelles sont les perspectives ?
Les récents amendements du projet de loi de simplification économique marquent une étape importante dans la régulation du développement commercial en renforçant les contrôles sur les implantations commerciales et en simplifiant certaines procédures administratives. Ces changements visent principalement à protéger les petits commerces tout en adaptant le paysage commercial aux défis de la transition écologique et du e-commerce.
L’examen en séance publique à l’Assemblée nationale pourrait encore ajuster ces mesures, notamment sur les Zones à Faible Emission (ZFE), supprimées en commission, ou encore sur les dérogations pour les data centers.
Si ces différents amendements adoptés en commission sont confirmés en séance publique, les entreprises devront notamment se préparer aux nouveaux seuils d’AEC et à intégrer les conséquences sur les commerces existants dans leurs dossiers CDAC.
Une veille active s’impose pour les acteurs du secteur !